Didier Decoin Docile
© J.F. Paga
Repères bibliographiques
Didier Decoin, membre de l'académie Goncourt, est l'auteur, entre autres, de John l'Enfer (1977, prix Goncourt), L'enfant de la mer de Chine (1981), La femme de chambre du Titanic (1991), La promeneuse d'oiseaux (1996), Madame Seyerling (2002), Avec vue sur la mer (2005), Henri ou Henry, le roman de mon père (2006), et Est-ce ainsi que les femmes meurent ? (2009).
Voir aussi mes fiches :
* Didier Decoin, "Une anglaise à bicyclette"
* Didier Decoin, "Lewis et Alice"
* Didier Decoin, "La pendue de Londres"
Référence : Didier Decoin, « Docile », éditions Le Seuil, collection Points, mai 1996, Gencod
« Que voulez-vous, elle était affamée,
Que voulez-vous, nous étions désarmés,
Que voulez-vous la nuit é&tait tombée,
Que voulez-vous, nous nous sommes aimés. »
Paul Eluard – Poésie et vérité - 1942
Le jeune Blaise Questier voudrait bien décrire cette odeur intime que dégage Docile, la jolie libraire qui vent de si beau livres de voyage et que Blaise adore aller voir dans sa petite boutique. Histoire improbable d’un amour impossible entre un petit bonhomme de douze ans et Geneviève, qu’on appelle Docile, une jeune femme qui a vingt ans de plus que lui, venue de l’Est et qui a vécu longtemps à Bruges.
La belle libraire utilise aussi ses charmes pour pouvoir vivre mais Blaise n’en a cure dans cette époque également improbable, la « drôle de guerre », période incertaine comme une aube entre chiens et loups. Mais la guerre, la vraie, finit par fondre sur cette petite ville du nord marquée par l’avance allemande de mai 1940. Tout lui plaît en Docile : le gris de ses yeux, le son de la voix, les courbes du visage et même l’odeur de son chandail.
C’est ainsi que Blaise s’intéressa aux livres de voyage, à la société de géographie et à son représentant Jacques Cohen-Colombe qui finit par fuir la guerre à New-York. Docile aussi va fuir la guerre et se réfugier à Paris, quittant un Blaise « encombré de sa propre enfance pour qu’elle puisse lui offrir ce qui restait de la sienne. »
Même si Docile doit mourir à la guerre, Blaise sait déjà qu'on ne peut pas oublier ses amours d'enfance. Docile disparut un jour dans le camp de Ravensbruck, « docile » à son destin, ayant refusé d’en changer le cours. Blaise apprit son sort par le commandant allemand Werner Derzer qu’il connut pendant la guerre. A la Libération, la vie reprit bien sûr son cours, son train-train quotidien, la librairie de Docile devint une boutique de mode, Blaise se maria avec son amie d’enfance Catherine Pérez. Mais il pensait toujours à la promesse qu’il s’était faite de baptiser une terre inconnue du nom de « Docile. » Et c’est encore une fois de destin qui lui permit de réaliser son rêve.
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