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Didier Decoin La Pendue de Londres

Didier Decoin, sa passion du fait divers et l'incroyable destin de la dernière pendue de Londres  © J.F. Paga

Repères bibliographiques

Didier Decoin, membre de l'académie Goncourt, est l'auteur, entre autres, de John l'Enfer (1977, prix Goncourt), L'enfant de la mer de Chine (1981), La femme de chambre du Titanic (1991), La promeneuse d'oiseaux (1996), Madame Seyerling (2002), Avec vue sur la mer (2005), Henri ou Henry, le roman de mon père (2006), et Est-ce ainsi que les femmes meurent ? (2009).

 

Référence : Didier Decoin, « La pendue de Londres », éditions Grasset, mai 2013, 336 pages, Gencod 978-2-2467-8390-

 

Lui : Bon époux et bon citoyen, bon tavernier recevant aimablement les clients dans son pub londonien "Help the poor struggler" (Aidez le pauvre type qui se débat),  il est aussi bourreau moderne chargé d’exécuter les criminels de guerre. En 1945, Albert Pierrepoint se rend en Allemagne dans un pénitencier vers Hanovre pour procéder à la pendaison de condamnés nazis, parmi lesquels se trouve l’ex gardienne de camps nazis Irma Grese, vingt-deux ans, surnommée la « Hyène d'Auschwitz ». Il fait son devoir, pratiquant froidement sa science de la mise à mort, même si exécuter une femme –de plus jeune et jolie- lui répugne profondément. 

Elle : Ruth Ellis a des airs de Betty Boop, belle et enjouée et désirable, plaisant aux hommes mais réagissant au coup de cœur sans savoir les choisir et qui se fera entraîneuse puis prostituée de luxe. Le dimanche de Pâques, 10 avril 1955, Ruth Ellis âgée de 28 ans, Malheureuse en amour, trompée et violentée par un amant alcoolique, tire à bout portant sur son amant David Blakely.

 

Ils n’auraient jamais dû se rencontrer mais la vie va ainsi et le bourreau va se rebeller devant ce nouveau devoir à accomplir. Mais un bourreau ne devrait pas se payer le luxe d’avoir des états d’âme, de se laisser émouvoir par l’air innocent de la belle Ruth, et refuser d’être le bras armé d’une société bien-pensant qui cachent ses vices derrière le paravent de la justice. Chant lancinant de la victime et du bourreau.

 

 

Didier Decoin et les faits divers - Interview

Dès mes 7-8 ans, dit-il, il guettait le facteur qui livrait le journal France-Soir et allait se planquer pour dévorer en page 3 les faits divers. C’est dans ce journal qu’il a lu un jour quelques années plus tard l'histoire de Ruth Ellis. Tous les détails y sont, les plans de sa cellule et de la chambre d'exécution… autant de détails qui frappent son imagination, lui qui rêve d’aller délivrer Rebecca d'York et Ruth Ellis, lui qui voit dans Barbe-Bleue un "serial killer" ou dans Le Petit Poucet un ogre.

 

Le cinéma aussi l’a influencé. Son père d’abord le metteur en scène Henri Decoin qui a adapté plusieurs œuvres de Georges Simenon, mais aussi les films noirs du cinéma américain qu'il allait voir avec son père, comme Derrière les hauts murs ou Rue sanglante... puis ce fut les romans de la Série noire et du Masque, nombreux dans la bibliothèque de son père.

 

Avant l’histoire de Ruth Ellis, Didier Decoin vous vous étiez intéressé à d'autres histoires de ce style comme la Texane Karla Faye Tucker, dans Madame Seyerling, ou plus récemment en 1983-84 Béatrice Saubin, emprisonnée en Malaisie pour trafic de drogue, qu’il a essayé d’aider en écrivant son histoire dans Béatrice en enfer qui a certainement aidé à sa libération. 

Pour un écrivain, on peut se demander de quelle façon il peut se saisir de cette histoire de fait divers, son rapport  à cette facette partielle  -et parfois partiale- de la réalité. La fiction qui en est tirée n’en est ni le reflet ni une déformation. Pour Didier Decoin, c’est d’abord une rencontre avec un personnage qu’il trouve plutôt sympathique et il a surtout vu les côtés positifs de Ruth Ellis sans trahir la réalité. Pour son cas, la documentation était plutôt pléthorique, livres, films, articles… sans compter le mouvement populaire qui l’a soutenue.

 

Le bourreau Albert Pierrepoint en particulier l’intéressait par le contraste qu’il offre, homme sympathique, bon époux et père de famille mais aussi bourreau froid et rapide, auteur de 432 exécutions mais qui finalement, hanté sans doute par ces images, refusera d’exécuter des femmes. Elle aussi Ruth est un condensé de la dure réalité de la vie, violée par son père, délaissée par le père de son enfant, poussée à la prostitution, tabassée par ses maris et amants. : violée par son père, délaissée par le père de son enfant, poussée à la prostitution, tabassée par ses mari ou amants... De la difficulté d’échapper à son destin, un thème cher à l’auteur.

 

Commentaires critiques

« L'académicien Goncourt a une passion, pas si secrète que cela, pour le fait divers. Et un faible pour les condamnées à mort. Il se penche cette fois sur la dernière Pendue de Londres, ou le destin captivant d'une prostituée à la Betty Boop qui tua par amour. »

Marianne Payot – L’Express, avril 2013

 

« C'est bien un Londres d'après guerre, magnifiquement rendu par Didier Decoin, celui sinistre, gris, pluvieux, des bas quartiers où sévissent les boites de nuit enfumées et glauques, la prostitution et fatalement les crimes. Toute une faune qui essaie de survivre presque comme une fatalité avec ce que cela engendre d'inhumain… »

Jean-Pierre Brissy, membre du jury "Prix des lecteurs Express" 2013 

 

Voir aussi mes fiches :

* Didier Decoin, "Une anglaise à bicyclette"

* Didier Decoin, "Lewis et Alice"

* Didier Decoin, "Docile"

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03/07/2013
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